La formule retenue était un débat diffusé en direct depuis le New Hampshire. Un panel d’électeurs républicains, tous habitants du Granite State — le premier État à organiser une élection primaire côté républicain — posait quelques questions à l’ancien président une nouvelle fois candidat à la Maison Blanche.
Kaitlan Collins, la correspondante principale de la chaîne à Washington a eu la lourde tâche de modérer les échanges. Donald Trump a lui-même annoncé le débat sur les réseaux sociaux avec un art consommé de la provocation et de la mise en scène, précisant les enjeux de la soirée face caméra « CNN cherche désespérément à retrouver l’audience qu’elle pouvait avoir quand j’étais président. C’est peut-être le grand renouveau de CNN. Qui sait, sans fake news cette fois. Ou alors, ce débat pourrait être un vrai désastre pour tout le monde. Pour eux, voire même pour moi. Voyons comment ça se passe ! »
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Trump a tapé dans le mille avec cette annonce : les commentaires sont unanimes, ce « townhall » fut un véritable désastre pour la chaîne. Comme attendu, Kaitlan Collins a eu affaire à un torrent de mensonges — élections volée, récit fallacieux de son rôle le jour de l’assaut du Capitole, etc. Sur l’avortement : « On laisse tuer des bébés après 9 mois de grossesse » — et plusieurs insultes. Si elle a fait un travail correct, la modération de ce genre d’entretien était un pari perdu d’avance. À l’inverse, ce débat fut une magnifique vitrine pour Trump. L’ex-président était chez lui, le public applaudissait, même (voire surtout) après ses propos les plus scandaleux, en lieu et place de le mettre sur la sellette, de tester son nouveau programme pour 2024, comme tout candidat qui désire briguer les plus hautes fonctions du pays. CNN était en territoire ennemi sur son propre plateau.
Est-ce le grand retour médiatique de Donald Trump après un début de campagne unanimement qualifié de médiocre ? Pour POLITICO, il s’agissait d’occuper l’ensemble du paysage médiatique de façon à invisibiliser ses adversaires. Une stratégie qui a fait ses preuves en 2016. Et il est certain que cela a bien fonctionné. C’est un très mauvais départ pour Ron DeSantis qui n’était pas invité. Le journaliste canadien Richard Hétu évoque même « un couronnement » pour Trump.
Pourquoi donc la direction de CNN a-t-elle choisi de donner l’antenne à Donald Trump seul ? On soulignera que, et ce n’est pas une fake news, les audiences de CNN sont au plus bas depuis dix ans. Sur le prime time, Fox News fait quatre fois plus d’audience.