En arrivant à Los Angeles, Marianne Williamson pensait partager son parcours spirituel en proposant des lectures de sa bible personnelle : A Course in Miracles. Très vite, elle constate que le virus du SIDA fait des ravages dans la ville mais aussi parmi ses élèves. Elle décide alors de lever des fonds pour venir en aide aux malades du SIDA. Rétrospectivement, si son aide précieuse est encore saluée de toute part, certaines voix se sont néanmoins élevées pour critiquer sa conception très « théologique » de la maladie.
2. L’épidémie de VIH
Début des années 80, Williamson quitte New York pour Los Angeles. Ses cours sur le livre A Course in Miracles rencontrent un certain succès. Mais une tragédie se produit devant ses yeux. Beaucoup d’hommes qui viennent assister aux séances tombent malades ou arrivent déjà malades. Pire, certains ne viennent plus parce qu’ils sont alités chez eux. La situation est grave. L’épidémie démarre à Los Angeles : 5 cas de pneumonie d’un nouveau type y sont détectés en 1981. Cette maladie inhabituelle inquiète la CDC ( pour Center for Disease Control) au plus haut point. En juin, le New York Times rapporte « 41 décès d’homosexuels des suites d’un cancer rare ». Les cas sont concentrés à New York et en Californie.
Williamson décide de venir en aide à la communauté homosexuelle atteinte du SIDA. Sa souffrance passée de personne atteinte de dépression l’aide à comprendre la souffrance des autres et la pousse à agir. À l’époque, les sidéens sont des parias. Ils sont virés de leurs emplois, rejetés par leur famille. Beaucoup échouent dans la rue. Alors que certaines églises blâment les gays, les rendent responsables de ce qu’ils endurent, considèrent leur sexualité comme une « abomination », la guide spirituelle venue de New York, elle, les accueille, leur dit que Dieu les aime comme ils sont. Son groupe de soutien est gratuit.
Au Los Angeles Center for Living, elle met sur pied le projet Angel Food. 200 repas par jour, parfois préparés et servis par des stars, et … des fleurs ! La bonne samaritaine mêle déjà spiritualité, entregent et activisme politique. Pendant ce temps, Ronald Reagan reste muet au sujet de l’épidémie. Le président ne prononce jamais le mot VIH en public. (il faudra attendre 1985). Pire, le 15 octobre 1982, lorsque la question est évoquée par Lester Kinsolving, un journaliste accrédité, le porte-parole de la Maison Blanche prend la question en dérision. « Avez-vous cette maladie Lester ? (Rires dans la salle de presse) ».
En 1987, la coach spirituelle en vogue parvient à rassembler 1 million de dollars pour aider les malades du sida de L.A. et de New York. Comment fait-elle ? Elle s’entoure de célébrités comme Cher, Madonna ou George Michael qui lui ouvrent leurs carnets de chèques et leurs carnets d’adresses. Vanity Fair s’intéresse à elle et fait son portrait. Beaucoup de Juifs athées américains semblent entourer le mouvement de la prophète New Age, décrit le magazine. Des Juifs athées qui prennent Jésus pour exemple, un message proche du Christ et pourtant si loin du christianisme… Difficile de s’y retrouver. Si les critiques fusent déjà concernant sa spiritualité, en revanche tout le monde loue son action pour aider les malades du VIH, souligne Vanity Fair.
La politique fait aussi surface. Une phrase est mise en évidence dans l’article de juin 1991 : « L’une des raisons pour lesquelles il y a une montée de la droite dans ce pays est que les conservateurs, eux au moins, reconnaissent l’existence de Dieu. Les libéraux ont perdu par défaut. La gauche ne veut même pas prononcer le mot Dieu. C’est ce que pense Middle America. Je suppose que, dans ce cas, Dieu revient au Parti républicain. »
Son engagement pour aider les victimes de l’épidémie fait l’unanimité à l’époque. C’est en 2020, lors de sa première campagne présidentielle, qu’arrive la controverse. N’a-t-elle pas proclamé à ses ouailles que « la maladie est une illusion de l’esprit » ? Certaines voix s’élèvent pour dire que Williamson aurait rendu les homosexuels coupables de ce qui leur arrivait. Selon cette logique, s’ils mouraient du sida ce serait parce qu’ils n’arrivaient pas à trouver « l’Amour » en eux. L’intéressée se défend catégoriquement d’avoir jamais conseillé aux malades du sida de ne pas se soigner. Plus encore, il n’y avait tout simplement pas de traitement. « Au contraire » , souligne un auteur-compositeur de Los Angeles interrogé pour le site d’information Slate, « Quand en 1985, le premier traitement est annoncé. Elle priait avec nous pour remercier Dieu. » Et quand les médicaments sont arrivés, elle a conduit elle-même des malades du sida chez le docteur et elle a payé pour leur traitement. Comment pourrait-elle dans ces conditions être anti-science, anti-médecine ?